Sous les lustres majestueux du Théâtre régional d’Oran, et dans les salons feutrés de l’hôtel El-Bey, la 8e édition de l’Oran Fashion Week s’est déployée comme un long poème textile, vibrant d’histoire, de beauté et d’engagement. Plus ambitieuse que jamais, l’édition 2025 a hissé la mode algérienne au rang d’acte culturel total, entre art, patrimoine, Soft Power et résistance symbolique.
La blousa oranaise : ambassadrice d’un héritage vivant
Le coup d’envoi de cette semaine de la mode a été donné dans un écrin chargé d’histoire. Le Théâtre régional d’Oran, transformé en temple de l’élégance, a accueilli un défilé hommage à l’un des joyaux du patrimoine vestimentaire algérien : la blousa oranaise. Signées Kasr El Amira, Radjaa Taleb ou encore Iza Création, les tenues ont revisité cette pièce emblématique avec audace et raffinement. Broderies en fils d’or, coupes fluides et textures nobles ont offert une lecture contemporaine de cette robe traditionnelle.

Au-delà de l’esthétique, cette mise en lumière s’inscrit dans une démarche patrimoniale forte. L’ambition de classer la blousa oranaise au patrimoine immatériel de l’UNESCO flotte comme une promesse d’avenir, portée par des créateurs passionnés et une vision à long terme.
La mode comme espace de dialogue international
Oran n’a pas seulement célébré sa propre histoire. Elle a aussi accueilli le monde. Des stylistes venus de Palestine, du Liban, de Jordanie, de Tunisie ou encore d’Allemagne ont répondu à l’appel du fondateur de l’événement, Lakhdar Nasr-Allah. Avec cette volonté claire : faire de la mode un langage universel, un terrain d’échange et de reconnaissance mutuelle. La présence remarquable de Waridi, représentante de Vogue Germany, habillée elle-même d’une blousa, a incarné ce dialogue transfrontalier.
Quand la mode devient message : émotion et mémoire sur le podium
La deuxième soirée, plus intimiste, a bouleversé le public. Plus de 15 créateurs algériens ont fait défiler leurs pièces dans une scénographie poétique et engagée. Des coupes inspirées de l’architecture saharienne aux textures urbaines et modernes, le prêt-à-porter algérien s’est affirmé comme une force créative en pleine expansion.
Moment phare de la soirée : l’intervention d’Asseel Alshaar, styliste palestinienne et invitée d’honneur. À travers ses créations brodées du tatriz — la broderie traditionnelle palestinienne — la mode s’est faite récit, mémoire et résistance. Drapées de keffiehs réinterprétés, les silhouettes ont traversé le podium avec une gravité majestueuse. Ce n’était plus un simple défilé, mais une procession silencieuse et puissante. Un cri brodé. Une prière debout.


Une édition solidaire et engagée
L’engagement ne s’est pas arrêté au podium. Fidèle à l’esprit de solidarité algérienne, une partie des bénéfices de l’événement sera reversée à la cause palestinienne. Une manière concrète de faire de la création un acte de soutien.
Vers une mode algérienne décomplexée et conquérante
Oran Fashion Week 2025 aura été bien plus qu’un événement glamour. Elle aura été un manifeste pour une mode algérienne libre, connectée, audacieuse, et fière de ses racines. Une mode qui ne cherche plus à plaire, mais à s’exprimer. Qui n’imite plus, mais qui inspire.
Et dans les pas lents ou décidés des mannequins, dans les regards fiers des créateurs, dans le silence ému de l’assistance, une certitude s’est tissée : la mode algérienne a trouvé sa voix — et elle porte loin.