Ils ne se contentent pas de revisiter le patrimoine vestimentaire algérien, ils le transforment, le réinventent, et l’imposent sur les podiums du monde entier. Stylistes, couturiers, modélistes ou artistes du fil, ces créateurs puisent dans leurs racines pour mieux penser le futur. À travers une mode à la fois ancrée et audacieuse, ils tissent un dialogue subtil entre héritage textile et innovation esthétique.
Sans prétendre à l’exhaustivité, ce listicle met en lumière cinq stylistes algériens hommes, qui tissent la nouvelle trame de la haute couture algérienne.
Amor Guellil
Formé à l’École des Beaux-arts d’Alger, Amor Guellil se fait remarquer dès ses débuts en 2013 lors du concours « Créateur des deux rives » à Lyon, avec une collection qui frappe par son audace : cuir, croco, cristaux Swarovski. Il mêle sophistication et héritage, s’inspirant de la richesse du vestiaire algérois pour faire renaître des pièces comme le seroual m’dewer ou la chelka, qu’il propulse hors des salons traditionnels pour les inscrire dans une modernité urbaine et cosmopolite. Sa participation à la Biennale du design confirme son positionnement unique dans le paysage de la création contemporaine.
Son univers s’inspire de figures iconiques comme Galliano, McQueen ou Yves Saint Laurent, tout en restant solidement enraciné dans les savoir-faire algériens. Entre mémoire et innovation, il incarne une génération de créateurs qui redéfinissent la mode algérienne, avec audace, engagement et une vision résolument contemporaine. Mais Amor Guellil ne se contente pas de sublimer les codes du passé, il repense aussi notre façon de consommer la mode. Dans une démarche écoresponsable, il développe une ligne de linge de maison à partir de textiles recyclés, issus de chutes industrielles, présentée lors de la deuxième édition de la Biennale du design algéro-française (2024-2026).

Eddine Belmahdi
Avec brio, le styliste franco-algérien Eddine Belmahdi s'est établi comme une figure incontournable de la mode algérienne actuelle. Diplômé de l'École nationale supérieure d'art de Lyon, il élabore une esthétique élégante où chaque création tisse un lien subtil avec l'héritage, sans jamais s'y enfermer. Le karakou, qu'il érige en icône, incarne parfaitement cette approche. Depuis ses débuts remarqués à l'Alger Fashion Week en 2016 jusqu'à sa place de demi-finaliste à Fashion Star Arabia en 2017, Belmahdi captive par son talent à marier émotion et innovation. Ses collections, telles que Deeja ou Miriam, explorent des récits personnels et universels, soulignant le rôle central des femmes nord-africaines dans son univers créatif.
Animé par une vision sans limites, il multiplie les initiatives : défilé à la Fashion Week de Paris avec sa collection Anthophila, lancement de parfums, diversification dans le prêt-à-porter, tout en habillant des personnalités telles que Nesrine Tafesh, Amel Bouchocha ou Kamilya Ward. Forbes le qualifie de « surdoué de la haute couture ». En 2025, sa participation à la Oran Fashion Week vient confirmer son éclat.

Karim Akrouf
Karim Akrouf continue de faire rayonner la mode algérienne sur les scènes internationales et son talent est une nouvelle fois reconnu : il a été sacré meilleur styliste du monde arabe lors du Arab Sat Festival 2024 au Caire, confirmant ainsi son statut d'icône régionale. Cette distinction s'ajoute à une série de récompenses prestigieuses, incluant l'Oman Fashion Show en 2021 et un défilé acclamé à la Semaine africaine de l'UNESCO en 2024, où son univers a su charmer au-delà des frontières.
Fondateur de la maison Petit Paris Création, Akrouf est revenu en Algérie en 2007, après des études de management à Paris, avec l'ambition de transformer le prêt-à-porter de luxe en un véritable hommage au patrimoine algérien. Son style audacieux réinterprète les silhouettes emblématiques – burnous, karakou, badroune à travers des coupes contemporaines et des matières précieuses comme la fetla brodée ou les pierres semi-précieuses. Avec ses couleurs éclatantes, ses lignes épurées et son savoir-faire profondément enraciné, son esthétique fait sensation sur les podiums mondiaux. En tant que juré de Project Runway El Djazair, il incarne parfaitement une génération de créateurs visionnaires, fidèles à leur culture et résolument tournés vers l'avenir.

Massinissa Akseur
Massinissa Akseur revendique un processus créatif transversal à la croisée de la tradition algérienne et de l'avant-garde internationale. Cet autodidacte, installé en Italie depuis 2012, puise ses inspirations ans sa culture amazighe, en plaçant au cœur de son œuvre les lettres tifinagh. Il développe ainsi un symbolisme abstrait qui résonne avec la mémoire et l’identité. Cette approche singulière lui a valu, en 2023, le prestigieux Lion d'Or des arts visuels à Rome. « Je suis le premier Lion d’Or africain, nord-africain et algérien », déclare-t-il avec fierté.
Artiste multidisciplinaire, Massinissa collabore avec des stylistes et des couturiers de renom, transformant ses œuvres en étoffes de soie sculpturales, on peut citer l’italien Gianni Tolentino. Il figure également dans le classement Artisti 22 parmi les 500 artistes contemporains les plus influents.

Samir Kerzabi
Très tôt, son sens du dessin et de l’élégance se manifeste. À quinze ans, Samir Kerzabi esquisse ses premières silhouettes, et trois ans plus tard, il dévoile ses premières pièces lors d’un mariage familial, qu’il transforme en défilé intime. Ce moment inaugural marque le début d’une vocation qu’il poursuivra avec ténacité.
Avant d’accéder à la reconnaissance, il construit patiemment son univers. Sillonnant les ateliers, explorant les subtilités du métier, il affine son regard et élabore un style singulier, à la croisée de la sophistication et de l’identité culturelle. En 1990, il fonde sa propre maison de couture, qui devient le théâtre de ses inspirations et de ses ambitions. Aujourd’hui, son travail contribue au rayonnement de la mode algérienne à l’échelle internationale, à travers des pièces emblématiques sublimées par un savoir-faire hérité, maîtrisé et résolument contemporain.
