Quel visage prend le design algérien quand il s’inspire de la mémoire, flirte avec l’artisanat et investit un lieu chargé d’histoire ? Pour le découvrir, direction la Citadelle d’Alger, où une exposition inédite mêle mobilier, bijoux, installations contemporaines et patrimoine vivant. Une immersion captivante dans la création algérienne contemporaine, à la croisée des héritages et des expérimentations.
La chaleur étouffante n’a pas dissuadé les visiteurs venus nombreux le 23 juillet dernier assister à l’ouverture de l’exposition « Réflexions sur le design… entre tradition et modernité », organisée par le Musée Public National d’Art Moderne et Contemporain d’Alger (MAMA) dans l’écrin exceptionnel de la Citadelle d’Alger. Petits et grands, habitants des environs, visiteurs de la diaspora ou étrangers curieux ont sillonné les espaces ouverts au public, guidés par Hachemi Saadi, ingénieur en génie civil et coordinateur du projet de restauration du site.

« La Citadelle d’Alger est un site historique classé par l’UNESCO en 1992 comme patrimoine universel », déclare Hachemi Saadi à Dzdia. « Une partie est ouverte depuis novembre 2020, et l’exposition actuelle vient animer ces lieux chargés d’histoire, dans une réflexion sur le design entre tradition et modernité », précise-t-il.
Un écrin historique pour une création contemporaine
Entre artisanat, innovation et mémoire collective, l’exposition met en lumière la richesse du design contemporain algérien à travers une sélection d’œuvres originales, fruit de démarches individuelles ou institutionnelles.
Installée dans l’un des espaces restaurés du site, elle réunit les créations de huit designers algériens et d’un designer burkinabè. Pensée comme un dialogue entre formes contemporaines et mémoire artisanale, elle mêle œuvres récentes, pièces de collection du MAMA et interventions sur mesure. Mobilier, objets, assises, bijoux et sculptures se côtoient dans une scénographie épurée, jouant avec les volumes et la lumière de l’architecture casbadjie.

Un pont entre innovation et héritage
Parmi les œuvres marquantes, Khedewej de Samir Hamiane retient l’attention. Inspirée de la légende de Khedaouedj El Amia, figure algéroise connue pour sa grande beauté et sa fascination pour son reflet, l’œuvre évoque l’histoire d’une femme qui aurait fini par perdre la vue à force de s’admirer dans son miroir. Cette figure, à la frontière entre mythe et réalité, continue de hanter l’imaginaire algérois et d’habiter la mémoire des vieilles maisons de la Casbah. « Mon œuvre Khedewej est une console en hommage à Khedaoudj El Amia. J’ai agrandi le miroir manuel pour donner l’illusion d’un miroir grandeur nature. La décoration autour du miroir a été faite par mon épouse Samia Boumehdi », précise le designer Samir Hamiane. En évoquant Khedaoudj El Amia à travers une pièce de mobilier, Hamiane tisse un lien étroit entre création artistique et récit légendaire.
Autres pièces mises en lumière, Les trois pensées, Bijoux kabyles et Assise turban sont signées Cherif Medjbar. Cette dernière reprend la forme d’un turban et s’inspire de l’étoffe traditionnelle portée par les femmes kabyles.
À leurs côtés, on retrouve également Kalam de Reda Selmi, Tektoukatte de Djamel Matari, MITALIKA de Chafika Ait Aoudia épouse Djelfaoui, les Tabourets, Étagères et Bahut de Hamed Ouattara, ainsi que Poly I et Poly II de Mohamed Ourad, témoignant de la diversité des approches et des matériaux.

Une visite guidée entre patrimoine et histoire
La visite de la Citadelle d’Alger, proposée aux visiteurs, complète l’exposition. Sous la conduite experte de Hachemi Saadi, les visiteurs explorent le site classé patrimoine mondial de l’UNESCO. Le parcours inclut notamment la visite de la mosquée du Dey, le quartier des janissaires, le hammam ou encore la poudrière, offrant une plongée dans l’histoire algérienne et une mise en perspective des lieux qui accueillent aujourd’hui cette exposition.
L’exposition « Réflexions sur le design… entre tradition et modernité » est visible à la Citadelle d’Alger jusqu’au 12 septembre 2025.
