Clap de fin pour la 20ᵉ édition des Rencontres cinématographiques de Béjaïa. Durant une semaine, la cinémathèque s’est transformée en un véritable carrefour de découvertes, d’échanges et de projections, confirmant l’événement comme l’un des rendez-vous phares du cinéma en Algérie. À l’issue de cette édition anniversaire, Hassan Keraouche, directeur des RCB et président de l’association Project’heurts qui porte le festival, revient sur l’esprit et la mission de cette aventure cinéphile.

Dzdia : Les Rencontres viennent de s’achever avec cette 20ᵉ édition. Elles ne sont que la partie visible de l’iceberg : quelle est la mission de Project’heurts et en quoi cet événement reflète-t-il votre démarche ?
Hassan Keraouche : L’association Project’heurts active tout au long de l’année, même si les Rencontres en sont l’événement phare. Notre objectif est de redonner vie aux salles de cinéma et d’encourager le public à y revenir. Aujourd’hui, il n’existe qu’une seule salle à Béjaïa, mais nous militons pour que d’autres ouvrent et offrent de nouveaux écrans à ce public fidèle, avide de cinéma, mais aussi de musique, de théâtre, de toutes les formes artistiques. En parallèle, nous organisons des activités régulières comme le ciné-club, mais aussi les Nuits du court-métrage, les Nuits du film d’horreur ou encore la Nuit du clip ainsi qu’un ciné-série qui permet de rapprocher le public des réalisateurs et comédiens de séries diffusées à la télévision. Tout cela repose sur le travail des bénévoles qui s’impliquent à l’année.
Dzdia : Contrairement à d’autres festivals, vos Rencontres ne sont pas compétitives. Pourquoi ce choix ?
Hassan Keraouche : Dès la création en 2003, nous avons décidé de nous éloigner du modèle «festival». Pas de prix, pas de tapis rouge, pas de paillettes ni de compétition. Nous voulons un évènement citoyen, où les réalisateurs et les comédiens rencontrent le public dans une ambiance conviviale, dans les cafés, sur les terrasses. Cela permet aux participants de profiter pleinement du moment sans stress lié à la compétition. Notre priorité, c’est l’échange et le partage autour du cinéma, pas la course aux distinctions.
Dzdia : Cette année, vous avez choisi d’ouvrir l’événement avec une projection destinée aux enfants. Quelle place occupe le jeune public dans votre démarche ?
Hassan Keraouche : Nous avons voulu inaugurer cette 20ᵉ édition en invitant les enfants, parce qu’ils sont notre public de demain. Tout au long de l’année, nous organisons des projections pour eux, les mardis et samedis, ainsi que des ateliers d’initiation au cinéma. L’idée est de les sensibiliser dès le plus jeune âge et, pourquoi pas, leur donner envie d’en faire un métier ou de devenir bénévoles plus tard. Dans vingt ans, nous espérons qu’ils seront encore là, soit comme spectateurs, soit comme acteurs de l’événement.
Dzdia : Vous organisez également des projections hors-murs”. Quelle est leur importance pour vous ?
Hassan Keraouche : Ces projections hors les murs nous permettent d’aller à la rencontre des habitants qui ne peuvent pas se déplacer jusqu’à la cinémathèque. Comme chaque année, nous avons travaillé avec les associations Ciné+ de Timezrit, Tadukli d’Aït Aïssa. Pour cette édition, un nouveau lieu a été intégré à Houma Ubazin, grâce à la collaboration avec une association locale. C’est une manière d’amener le cinéma au plus près des citoyens, de leur donner envie de participer et, à terme, de venir jusqu’à nous. Nous réfléchissons même à mettre en place des navettes depuis certains villages, car la question du transport, surtout la nuit, demeure un véritable frein.
Après vingt ans, quels souvenirs vous ont marqué et qu’est-ce qui vous motive encore à poursuivre cette aventure bénévole ?
Ce qui fait vivre les Rencontres, c’est l’engagement bénévole. Depuis 2003, tout repose sur la passion et l’amour du cinéma. J’ai moi-même commencé comme bénévole : en 2007, on m’avait d’abord refusé l’accès car «c’était complet», puis le président de l’époque, Abdenour Hochiche, m’a rattrapé et m’a confié des affiches à poser. Aujourd’hui, je suis président, et je raconte souvent cette anecdote avec humour. Les Rencontres portent bien leur nom : j’y ai rencontré ma femme, elle aussi bénévole, et aujourd’hui nous transmettons cet esprit à nos deux filles, Léa et Amélia.