Il y pensait depuis le début. Bien plus qu’une simple date sur un calendrier, ce concert à Alger représentait pour Toufik Bouharoua, alias TIF, le point d’orgue d’une tournée dense, marquée par de nombreuses scènes. Mais ce soir-là, il n’était pas question de cocher une étape de plus. Il était chez lui. Devant les siens, sur sa terre, il clôturait un chapitre, les yeux pleins de reconnaissance. C’était le dimanche 3 août dernier, à la Coupole du Complexe Olympique Mohamed Boudiaf, lieu emblématique de la capitale.
Lors d’une conférence de presse, avant de monter sur scène, il confiait : « Symboliquement, ça représente beaucoup. » Car finir ici, c’était bien plus qu’un retour : c’était un geste de gratitude, une déclaration d’amour à son public, à sa ville, à son pays.
Un concert à la maison, avec les siens
Le public a répondu présent, porté par une énergie rare, et bientôt ses voix se sont mêlées à la sienne, formant un chœur immense qui respirait au même rythme. Sur scène, les surprises se sont enchaînées : Rim’K, puis Kateb Amazigh, figure de Gnawa Diffusion.
Pour TIF, cette soirée n’avait rien d’un simple concert. C’était une offrande, pensée comme un moment d’authenticité, entouré des siens, sur sa terre. Avant même de monter sur scène, il en avait donné le ton lors de la conférence de presse, en lançant un message limpide :
« On aime jouer chez nous. Et on souhaite qu’il y ait plus de concerts ici. On souhaite la réussite à toute la jeunesse algérienne. Comme nous on l’a fait, beaucoup peuvent le faire aussi. »

Racines sonores et mystères assumés
Il ne fait pas du chaâbi ni de la musique andalouse. Pourtant, ces sonorités sont là, en filigrane. Elles l’ont façonné, elles orientent sa manière de composer, de poser, de transmettre. « Les rappeurs ne les utilisent pas, parce qu’ils ne les connaissent pas. Nous, on a pu rapporter de nouvelles choses », confie-t-il lors de la conférence de presse. Sa musique parle rap, mais laisse vibrer ces racines qui l’habitent encore.
« Je préfère t’imaginer pour faire abstraction de ta partie laide. »
Lors de cette même rencontre, Dzdia l’interroge sur une phrase qui intrigue dans la chanson Il est 2h et tu me manques : « Je préfère t’imaginer pour faire abstraction de ta partie laide. » Y a-t-il un sens caché, quelque chose que ses fans n’ont pas encore déchiffré ? Il coupe court : « Je peux juste dire que je ne parlais pas d’une personne. POINT. » Pas d’explication, mais une ambiguïté revendiquée. Et à force d’écouter ses textes, le sens affleure : il parle de son pays, de ce lien complexe, parfois rugueux, mais traversé d’amour et de fierté.

Un cap clair : festival, album… et un concert XXL ?
Après cette tournée dense, TIF prépare un projet ambitieux : lancer dès l’an prochain un festival en Algérie, un rendez-vous pensé pour rassembler des artistes, fédérer un public et affirmer la force d’une scène locale trop souvent sous-estimée. « Ce n’est pas juste pour faire du bruit, mais pour montrer que cette scène est vivante, riche et capable », insiste-t-il. L’idée est claire : créer un espace qui rayonne ici, mais aussi à l’international.
Ses ambitions ne s’arrêtent pas là. La tournée a repoussé son calendrier, mais il promet que l’album arrive « très bientôt ». Et quand on évoque une date dans un stade, il ne sourit pas par politesse : « C’est envisageable », lâche-t-il. Derrière cette phrase, on devine moins un rêve qu’un cap. Un projet qu’il nourrit déjà, avec cette même volonté qui l’a porté jusqu’à la Coupole.